Préavis d’intention concernant la création d’un partenariat avec les Services Industriels de Lausanne (SIL) pour la réalisation d’un réseau de chauffage à distance (CAD) et la création d’une société anonyme (SA) avec les SIL et Romande Energie Services SA (RES) pour la construction et l’exploitation d’une centrale de production de chaleur à énergie renouvelable
Monsieur le Président, Messieurs de la Municipalité, cher.e.s collègues,
Le préavis que nous avons à traiter fait suite au préavis n°3-2020 accepté par notre Conseil le 25 février 2020. J’avais alors souligné que si 64% de la chaleur alimentant le réseau lausannois provenait bien de l’usine de valorisation des déchets de Tridel, seulement la moitié de cette part était considérée comme renouvelable par la Confédération. Cette affirmation a été confirmée depuis par l’Office fédérale de l’énergie dans une communication du 15 juillet 2020 en réponse à la question de la Conseillère nationale Isabelle Chevalley.
A l’heure actuelle le chauffage à distance est donc « bien peu renouvelable » comme je l’ai écrit dans la rubrique « l’invité de la semaine » de l’hebdomadaire Lausanne Cités du 27 mai 2020 avec près de 40% de la chaleur produite avec du gaz fossile.
Mais, depuis, Lausanne a publié son « Plan Climat » le 7 janvier de cette année. Et ce dernier devrait être accepté sans trop de difficultés par son Conseil communal. La Capitale va donc sortir à l’horizon 2050 du gaz fossile entre autres grâce au bois. Cette décision est très importante et il convient de la saluer comme il se doit.
A travers le préavis d’intention que nous traitons aujourd’hui, notre commune envoie elle aussi un signal fort pour diminuer de manière radicale ses émissions en CO2 tout en participant à l’effort de toute l’agglomération.
En tant que citoyen palinzard et responsable pour la Suisse romande de l’association faîtière de la promotion du bois comme source d’énergie, Energie-bois Suisse, je souhaite féliciter notre Municipalité pour ce projet et émettre les remarques suivantes :
1. La ressource bois
L’approvisionnement durable et écologique de la ressource sous forme de bois déchiqueté, appelé plaquettes ou copeaux de bois, est assurée par le Canton qui évalue le potentiel de la ressource à l’échelle du territoire depuis plus d’une dizaine d’année au fur et à mesure des nouveaux projets. Il n’y a donc aucun risque de pénurie et la gestion durable de nos forêts est assurée.
Notre municipal Roland Perrin pourrait nous en parler longuement puisqu’il a directement participé à cette tâche d’évaluation il y a quelques années.
2. La cogénération
Si le principe de la cogénération, la production couplée de chaleur et d’électricité, fait pleinement sens sur un chauffage à distance, elle implique un surcoût élevé tant en termes d’investissement que de frais d’exploitation. S’il en était autrement, cela ferait plus de vingt ans que les installations au gaz fossile utiliseraient cette voie de valorisation énergétique.
Pour le bois-énergie, la fin du programme fédéral de rétribution à prix coûtant, abrégé « RPC », signifie que la cogénération est actuellement dans une impasse. Energie-bois Suisse et d’autres acteurs sont actuellement très actifs au niveau politique à Berne pour mettre en place un nouveau programme, mais rien ne peut être assuré dans le délai court du projet discuté ici. Et n’oublions pas la possibilité d’un éventuel refus par le peuple en juin de la loi sur le CO2 qui signifierait probablement une plus grande difficulté pour cette démarche.
La prise en compte de l’éventualité d’une absence de nouvelle RPC est importante. En effet dans ce cas de figure, la technologie de gazéification proposée par Romande énergie n’est peut-être pas la plus économique pour produire seulement de la chaleur en comparaison avec la technologie de combustion à grille mobile avec électrofiltre. Il conviendrait d’étudier ce point en détail, ce qui est toujours faisable à ce stade du projet.
A noter qu’en ce qui concerne les émissions en poussières fines, l’une ou l’autre de ces technologies permettent d’approcher le seuil de détection des appareils de mesure, soit bien plus bas que les limites fixées par l’Ordonnance fédérale sur la protection de l’air. La problématique des poussières fines liées à la combustion du bois ne concerne en effet pas les installations ultramodernes dont on parle ici. Les très nombreuses installations récemment mises en service dans le Canton et ailleurs en Suisse en attestent.
3. Localisation de la centrale de chauffage
La localisation de la centrale de chauffage est un point clé pour ce genre de projet. En plus de la surface nécessaire à la centrale, le transport et l’accès de la ressource bois par camion est une contrainte majeure.
Si le préavis nous informe de différentes variantes étudiées et que Monsieur le Municipal Krattinger a répondu aux questions des commissaires, le fait est que relativement peu d’indications (p.ex. un plan) nous ont été données pour justifier le choix énoncé.
Cher.e.s collègues, nous avons à nous prononcer sur un préavis d’intention concernant un projet d’envergure pour notre commune encore au stade initial. Je vous invite à le soutenir tout en me permettant de formuler les deux vœux suivants :
1. Qu’il soit réalisé une analyse financière comparative sur les coûts de production de chaleur en l’absence de RPC avec la technologie de gazéification et avec la technologie par combustion et électrofiltre. La qualité supérieure des plaquettes de bois pour la gazéification, et donc le prix supérieur, devrait être pris en compte dans les calculs.
2. Compte-tenu du résultat du vœu qui précède, que le choix de la localisation de la centrale de chauffe et donc de la variante 1 ou 3 soient revalidés.
Je vous remercie pour votre attention.
Richard Golay, le 16 février 2021